Nez et cerveau
Notre nez est un organe extraordinairement sensible, comportant des millions de cellules réceptrices capables de distinguer les odeurs avec une acuité extraordinaire. Ces cellules réceptrices sont reliées au système limbique de notre cerveau, cette partie archaïque dans laquelle nos instincts et nos émotions trouvent leur origine. De ce fait, les odeurs pénètrent en nous, à notre insu, bien plus profondément que nous ne pourrions le croire.
Des études ont montré que le cerveau réagit en envoyant à l’organisme des messages hormonaux qui influent plus ou moins fortement sur notre état psychique. Globalement, dans toutes les parties du monde, les odeurs boisées seraient apaisantes ; les senteurs florales stimuleraient les fonctions intellectuelles ; les senteurs citronnées auraient des effets dynamisant, tandis la cannelle et le santal réconforteraient sur le plan affectif…
Se parfumer soi-même ou parfumer sa maison n’est pas un geste anodin. En effet, les odeurs sont susceptibles, tout comme les couleurs et les ambiances musicales, d’influencer nos émotions et notre humeur. Comme les fleurs, les parfums ont leur langage, jusqu’ici encore peu exploré. Ce langage repose sur des repères universels mais aussi culturels. Il relève également de l’intime.
Souvenirs d’odeurs anciennes
Nous ressentons nos premières impressions olfactives avec le lait de notre mère et son odeur corporelle. Nous continuons avec l’odeur particulière d’un vieux « doudou », celle de l’after-shave utilisé par notre père, les fumets de la cuisine d’une aïeule, les senteurs des plantes poussant sous notre fenêtre, l’odeur de la craie et du tableau noir mal essuyé, celle des livres neufs, du tilleul ou du troène en fleurs au bout de l’allée, le parfum piquant du menthol ou de l’eucalyptus qui ont soigné nos rhumes, la douce odeur de vanille de notre dessert préféré ou l’arôme puissant du chocolat chaud. Peu à peu, nous dessinons ainsi la vaste carte de notre géographie olfactive culturelle et personnelle. Chaque odeur est analysée par notre cerveau en fonction du filtre de notre vécu propre. C'est pourquoi une odeur associée à un souvenir heureux est susceptible de déclencher la bonne humeur, et inversement un parfum associé à un souvenir douloureux peut provoquer un sentiment de tristesse. Tout cela se passe souvent à l’insu de notre vécu conscient. En somme, en matière d’odeurs et de parfums, il faut se fier avant tout à sa propre intuition et s’attacher à recréer dans sa maison les parfums qui ont pour nous une charge émotionnelle positive, en tenant compte aussi du ressenti des autres personnes vivant sous le même toit.
Une étroite association entre odeurs et émotions
L’association entre odeurs et émotions est telle qu’il est possible de soigner certains états psychiques en respirant certaines odeurs. Notamment, les parfums puissants des huiles essentielles ont une influence sur nos émotions et nos comportements. Des problèmes d'humeur, d'anxiété, voire de dépression, peuvent être efficacement traités par les huiles essentielles par voie olfactive : c’est l’objet de l’olfactothérapie. Cette technique permet de court-circuiter les cheminements mentaux habituels et de réduire le temps de certaines thérapies. Le thérapeute Gilles Fournil s’y est intéressé dès les années 1990. La thérapie olfactive est encore peu utilisée, mais ouvre des voies nouvelles et prometteuses… à moins qu’elle ne redécouvre une science disparue en même temps que des civilisations anciennes ?